Les moines en Argonne - Le patrimoine monastique aujourd'hui
Alcide Leriche dans son ouvrage "En Argonne : Sur les traces des Moines" évoque ainsi l'implantation des moines en Argonne, " Des massifs forestiers étaient propices à la solitude. Les ascètes quittaient les villes pour vivre isolés et qu'on appelait monachoi, de là le terme de moines ou solitaires, trouvèrent en Argonne toutes les conditions réunies pour un isolement complet" et de se poser la question "comment des hommes sans ressources ont réussi à vivre et à construire dans cet isolement ?". En fait, dans leur peu de bagages matériels emmenés, ils portaient en eux de nombreuses connaissances. Et dont aujourd'hui, nous pouvons mesurer l'étendue et apprécier au travers du patrimoine monastique encore présent en Argonne.
Lors de leur implantation et durant leur vie monastique, les moines défrichent les bois, assainissent et assèchent les marécages, créent des étangs pour l'activité piscicole, cultivent des terres difficiles, plantent des vignes et fabriquent des mérrains. Ils s'emploient et développent des industries comme la verrerie ou la métallurgie. De ces activités et de la perception des dimes, les abbayes s'enrichissent.
Les communautés religieuses ne vont pas toujours avoir la paix à laquelle elles aspiraient. Les invasions, les Guerres de 100 ans et de 30 ans, La Fronde, les dissensions internes s'accompagnent de fureurs destructives. Les moines s'emploient à reconstruire. Mais la plupart subissent la tourmente et "le coup de grâce" de La Révolution. Les moines sont expulsés, après inventaire des biens, mobilier et immobilier sont vendus, les bâtiments sont détruits ou fortement endommagés.
La Collégiale Saint-Germain à Montfaucon d'Argonne - Les fondements datent du début du VIIème siècle (620) par la construction d'un monastère, amorcé par la venue de Saint-Baldéric en 597 qui érige un oratoire dédié à Saint-Pierre sur la butte. Dés le début du Moyen Age, Montfaucon est le siège d'une abbaye, la première en Argonne. Après les déconvenues initiées par les soldats de Charles Martel à l'encontre de l'abbaye, Pépin le Bref et Charlemagne sentent un devoir de réparation, ce dernier est considéré comme le fondateur de la collégiale Saint-Germain. Moines et bâtiments doivent encore subir les invasions des Normands et des Hongrois, puis les dissensions entre les évêques de Verdun, les comtes de Bar et de Grandpré. Mais, elle est épargnée à la Révolution. Dés les premières heures de la Guerre 14-18, les bâtiments sont fortement endommagés par les bombardements français suite à la présence des allemands sur la butte, laissant les ruines que nous connaissons aujourd'hui.
L'ermitage de Saint-Rouin et L'Abbaye de Beaulieu-en-Argonne fondée en 642 par Saint-Rouin. Nous les trouvons sur le chemin de randonnée GR14.
L'imposant pressoir abbatial du XIII éme siècle à Beaulieu-en-Argonne - Il fonctionne jusqu'en 1900. En effet, la vigne est l'une des spécialités des moines en Argonne, favorisée par le Comte Thibault de Champagne pour la plantation des coteaux en vigne. Nous pouvons admirer ce pressoir, prévu d'être démantelé, il sauvegardé grâce à l'intervention de l'épouse de Raymond Poincaré venu inaugurer le monument aux Morts.
Moiremont est le lieu d'un ancien monastère de l'ordre bénédictin, puis d'une ancienne abbaye. Sous l'église de Moiremont dont l'origine remonte au début du XIIème siècle se trouve la crypte nommée Notre-Dame aux Grottes, un des vestiges et trésor préservé. Les stalles et une porte de l'abbaye se trouve dans l'église (Horizons d'Argonne n°21).
Une évocation des moines défricheurs à Moiremont
L'église abbatiale de Lachalade accolée aux bâtiments réguliers selon le plan type d'une abbaye cistercienne. Depuis une étude réalisée en 2016, les bâtiments bénéficient d'un programme de travaux sur plusieurs années, toujours en cours encore actuellement. Un article sera consacré à cette abbaye.
Dans une vaste clairière du Nord de l'Argonne, La Châtreuse du Mont-Dieu avec son bâtiment principal construit en 1616 et 1617. La première charte de fondation est datée de 1137.
Une photo panoramique pour annoncer un futur article consacré à ce site et à ses dépendances (La Correrie et la grange dimière)
Le Prieuré de Beauchamp se situait dans un vallon boisé, le long du Ruisseau de Beauchamp. Sa fondation remonte peut-être au début du XIIIème siècle. C'est aujourd'hui une exploitation agricole.
L'Abbaye de Belval-Bois-des-Dames est fondée en 1131 par Albéron de Chiny, évêque de Verdun. D'abord habitée par des chanoines de Saint-Augustin, ils sont rapidement remplacés en 1133 par des moines de Prémontré (Alcide Leriche, 1979). Actuellement, c'est une propriété privée dont l'activité est une exploitation agricole. Les stalles et la chaire à prêcher se trouvent dans l'église de Grandpré.
L'Abbaye de Châtrices est édifiée entre 1142 et 1145 (Alcide Leriche, 1979). Aucunes traces ne subsistent, si ce n'est une vaste cour. Les moines de l'abbaye vont participer à la canalisation de la Biesme pour le flottage du bois.
L'Abbaye (prieuré) de Chaudefontaine - Seul, le nom de "Cour du Prieuré" rappelle l'occupation de ce site d'une vie monastique. La statue de Saint-Laurent ornant la façade principale de l'Eglise de Chaudefontaine est le seul bien conservé.
Filiation de l'Abbaye de Lachalade, l'Abbaye de Chatel-Chéhéry est fondée au XIIème siècle. La communauté va se constituer un important patrimoine agricole, mais aussi développer l'activité verrière et métallurgique. En septembre 2019, une souscription est lancée pour la rénovation du bâtiment en partenariat avec la Fondation du Patrimoine (site Internet de l'Abbaye de Chéhéry).
A Lançon, dans la rue principale se situe une ancienne bâtisse, vestige du Couvent des Chanoinesses de Saint-Augustin. Une statue de Saint-Augustin se trouve prés du porche de l'Eglise de Lançon évoque ce couvent.
Elevé au titre d'abbaye, Le Prieuré de Landèves - Un des bâtiments restant est devenu une maison d'habitation. Au regard de son architecture de 1830, les locaux l'appellent "le château". Dans le parc, se trouve une croix en souvenir de la présence des religieux.
L'Abbaye de Monthiers-en-Argonne fondée en 1134. Il reste quelques vestiges sur le terrain devenu une exploitation agricole.
Du Prieuré Saint-Thomas-en-Argonne, dont l'origine remonte au Xème siècle, il ne reste aucunes traces.
Le Prieuré de Senuc évoqué par Louis Brouillon dans "L'Argonne, guide touristique et du promeneur"
En 1625, le Couvent des Annonciades est fondé à Varennes-en-Argonne. A partir de 1792, les bâtiments sont utilisés comme tribunal, gendarmerie et prison, puis il seront vendus en lot à des particuliers. La Guerre de 14-18 achèvera les destruction.
Le patrimoine monastique, c'est aussi des moines illustres comme Dom Pérignon, l'inventeur du Champagne, natif de Sainte-Ménehould.
Mais aussi, Dom Mabillon, né à Saint-Pierremont en 1632. Il devient moine bénédictin de la congrégation réformée de Saint-Maur et passe une partie de sa vie à l'Abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Erudit, il est connut pour ses recherches, ses travaux et comme l'un des fondateurs de la science historique française et s'employa à la transmission du savoir historique entre Moyen Âge et modernité
Les étangs en Argonne, un paysage construit par les moines. Au creux des vallons des chaines d'étangs.
Pour situer le patrimoine monastique en Argonne (carte réalisée par jlargonnais)
Documentation :
Jean Cabanel, Pays et paysages de France, ed. Edition du Rouergue, 2006, p. 15 à 18
Alcide Leriche, en parcourant l'Argonne, 1973
Alcide Leriche, "En Argonne : Sur les traces des moines...", imp. LEFEVRE, février 1979
Alcide Leriche, "Les Abbayes argonnaises", Connaissance de la Meuse, septembre 1989, n°14, p.27 à 28
Jeannine Cappy, Heurs et malheurs du vignoble argonnais, Le Petit Journal de Sainte-Ménehould et ses voisins d'Argonne, octobre 2003
Jean Marchal, l'Argonne, guide touristique, 1963
Noëlle Gauthier, L'Argonne monastique 1ère partie, L'Abbaye cistercienne de La Chalade, Horizons d'Argonne n°21, 1970, p.1 à 7
Jean Marchal, L'Argonne monastique 1ère partie, L'Abbaye de Chéhéry, Horizons d'Argonne n°21, 1970, p.8 à 12
Jean Marchal, L'Argonne monastique 1ère partie, L'Abbaye de Moiremont, Horizons d'Argonne n°21, 1970, p.13 à 20
L'Argonne monastique 1ère partie, L'ancien Prieuré de Chaudefontaine, Horizons d'Argonne n°21, 1970, p.21
Colonel H. Rousseaux, Un défricheur de forêt : Saint-Baldéric, Horizons d'Argonne n°24, 1972, p.97 à 100
Jackie Lusse, Les limites dans les chartes de l'abbaye de Montiers-en-Argonne : les moines accapareurs de terres et la désertion des villages (XIIe-XIIIe siècles), Nouvelle revue d'onomastique, 1998, p. 223-240
F.-L. Ganshof, La dîme monastique, du IXe à la fin du XIIe siècle, Cahiers de Civilisation Médiévale, Année 1968, p. 413-420
Varennes-en-Argonne 1622-1792 par L'Annonciade, Août 4, 2018
https://tourisme-argonne.com/la-collegiale-saint-germain/
http://erwan.gil.free.fr/index.php?mod=freepages&pageid=56
http://abbaye.lachalade.free.fr/
http://www.catholique-verdun.cef.fr/spip/spip.php?page=service&id_article=1191
http://inventaire-patrimoine.cr-champagne-ardenne.fr/dossier/ancienne-abbaye-de-montiers-en-argonne/3e3ab81a-0da1-4fd5-972d-6c79a9a9d8f6
http://www.actuacity.com/saint-thomas-en-argonne_51800/monuments/
https://www.chehery.com/
Date de dernière mise à jour : 08/01/2021
Commentaires
-
- 1. pascale vautard Le 08/01/2021
toujours très intéressant! et ça me donne envie de visiter tous ces sites dès les beaux jours!-
- jlargonnaisLe 16/01/2021
Bonjour Pascale ; J'espère que la crise sanitaire nous laissera un peu de répit pour parcourir l'Argonne.
Ajouter un commentaire