La Reconstruction en Argonne après la Première Guerre mondiale
Une ligne de front dévastatrice pour l’Argonne
Début août 1914, la guerre est déclarée entre la France, Le Royaume-Uni et l’Allemagne et leurs alliés respectifs. L’armée allemande envahit la Belgique, puis déferle sur le Nord et l’Est de La France. Les allemands arrivent aux portes de Paris. Le Général Joffre va donner l’ordre de ne plus reculer et tente une contre-attaque. C’est la Première Bataille de la Marne du 5 au 12 septembre 1914. D’une guerre de mouvement, elle devient une guerre de position. Une partie du front se stabilise en Argonne. La ligne de front coupe le massif argonnais d’Ouest en Est à sa partie médiane. L’Argonne avec son relief, ses forêts épaisses, sa géologie particulière avec la gaize facilitent la fortification des positions et des zones de cantonnement.
La Guerre des mines
La gaize est une roche assez tendre facilitant le creusement des tunnels pour aller sous les lignes ennemis et placer des charges explosives. C’est la guerre des mines (1915). Ces explosions ont des effets dévastateurs sur le paysage et sur un village, Vauquois.
Les années de guerre s’écoulent et laissent des séquelles. Après quatre années, les villages sont en ruines, les terres sont anéanties, où parfois, des croix indiquent le sacrifice.
En novembre 1918, l’armistice est signé. Il faut maintenant reconstruire.
Au préalable, il convient de recueillir les corps et de les enterrer dignement dans des cimetières ou dans des nécropoles en tombe individuelle quand le nom est connu. Lorsque, faute d’être identifiés, les corps sont réunis dans des ossuaires comme ceux de La Gruerie (1923) ou de La Haute-Chevauchée. Dans les nécropoles, il s’agit de « carré » dédié à cet effet.
Concernant les « Sites funéraires et mémoriels de la Première Guerre mondiale », un dossier est déposé à l’UNESCO. A ce jour, cette instance se donne encore le temps pour étudier cette demande.
La construction des monuments aux morts
Lors de la création des monuments aux morts, certaines œuvres se banalisent, notamment part le recourt à des moulages. Le Ministère de l’Intérieur décide, par la circulaire du 20 mai 1920, de la mise en place de commissions artistiques départementales chargées de l'examen des projets.
Monuments au Morts de Servon-Melzicourt
Monuments aux Morts de Neuvilly-en-Argonne et de Vienne-le-Château
La construction des monuments commémoratifs
Il est construit aussi des monuments commémoratifs comme le Monument de Pennsylvanie ou la Tour de Montfaucon-d’Argonne. D’autres monuments plus modestes sont visibles le long des routes, à l’orée des forêts, au bord d’un champ. Ils commémorent un fait de guerre, un illustre soldat tué.
Les boulders matérialisent l’avancée de la 2nd Division américaine vers Somerance
Les villages et l’architecture avant guerre.
Dans l’ensemble, les villages présentent un bâti assez compact et continu le long des rues. Les maisons sont composées de pans de bois, les granges sont au milieu du village, en bordure de chaussée est laissé libre un espace - l’usoir où l’on travaille, dépose le fumier ou les outils agraires. Les habitants et les animaux se côtoient.
La reconstruction des villages - L’architecture après la Première Guerre mondiale
La « Charte des sinistrés » - Le 17 avril 1919 est votée la loi sur la réparation des dommages causés par les faits de la guerre, dite « Charte des sinistrés ». La base est le principe de solidarité. Les sinistrés se regroupent en coopérative afin de gérer les dossiers plus rapidement et d’être conseiller, certaines sont spécialisées comme les coopératives des mairies-écoles ou diocésaines.
A la fin de la guerre, les villages sinistrés sont adoptés par des communes non touchées (immobilier) par la guerre. Elles apportent des aides financières pour la Reconstruction, par exemples :
- Pour Saint-Thomas-en-Argonne, les communes donatrices sont, Dra El Mizan, un village du département d’Alger et Courbevoie
- Pour Vauquois, la ville donatrice est Orléans.
- Vienne-le-Château, la ville de Châtres
Face à la population démunie, des habitats provisoires sont proposés. Il est conçu 2 types de cabane, la cabane Adrian et la cabane Nissen.
Certains villages ne sont pas reconstruits ou le sont un peu plus loin. A l’exemple de Béthincourt en Argonne meusienne.
Une initiative intéressante - En 1950, suite à la création du Camp de Suippes, le nom des villages du Vallage détruits durant la Première Guerre mondiale est rattaché aux communes voisines. A celui de ..... est attaché.......
Rouvroy-Ripont
Sommepy-Tahure
Souain-Perthes-Les-Hurlus
Minaucourt-le-Mesnil-les-Hurlus
Wargemoulin-Hurlus
C’est le génie civil qui est en charge d’étudier les nouveaux plans avec la notion d’hygiénisme. Les villages sont recomposés et deviennent aérés, moins denses. L’habitat est individualisé. En général, les étables sont séparées des logis afin que les animaux ne cohabitent plus avec les personnes. Les villages se dotent notamment de l’adduction d’eau et développeront leurs réseaux électriques un peu plus tard. Il convient, aussi, de penser à l’arrivée de l’automobile.
Sur les bases de l’architecture traditionnelle et des particularités régionales, dés 1915, La Société Des Architectes du Gouvernement (SDAG) effectue des recherches sur la standardisation des procédés de construction et l’élaboration des matériaux de substitution. L’Union des syndicats d’architectes agréés publie un album de 59 planche : « Standardisation d’éléments de construction – Charpente et menuiserie », dont une partie caractérise des éléments architecturaux propres aux régions impactées.
Les maisons sont reconstruites en série, avec un étage. Les ouvertures sont symétriques par rapport à l’axe de la porte d’entrée. La brique est fabriquée industriellement et est majoritairement utilisée. L’utilisation de nouveaux matériaux, notamment le béton, les profilés d’acier en I (IPN) se généralisent, ainsi que la pierre taillée industriellement. Les volets en bois sont remplacés par des persiennes métalliques. Il en est de même, pour les toitures avec des couvertures réalisées en tuile à emboitement, dite mécanique de part sa fabrication mécanisée.
Les maçons apportent une touche esthétique en réalisant des ornements avec des briques aux couleurs différentes, en relief ou en utilisant les diverses méthodes d’appareillage. Les motifs sont géométriques sur les façades, soulignent les chaines d'angles, les bandeaux et les corniches en forme de frise. En Argonne meusienne, les façades sont crépies. Les ouvertures sont cintrées et, là encore, le maçon rehaussent les ouvertures par un jeu de briques.
L’architecture s’inspire de l’Art Déco qui succède à l'Art Nouveau. Les deux mouvements émergent en réaction aux grands événements mondiaux. L’Art Nouveau s’inspire de la révolution industrielle. Tandis que l’Art Déco se développe suite à la Première Guerre mondiale.
A Varennes-en-Argonne, les architectes laissent libre leur imagination
A Varennes-en-Argonne, une maison bourgeoise (bourgeoisie locale, grand fermier ou industriel) est mitoyenne à une maison plus modeste.
Les mairies-écoles
Ces édifices publics deviennent le symbole de la République victorieuse. Elles se doivent d’être remarquables et affirmer le caractère institutionnel.
Mairie-école de Neuvilly-en-Argonne, inaugurée en 1926
Mairie-école de Saint-Thomas-en-Argonne
Les églises
L'église Saint-Martin à Apremont-sur-Aire est détruite lors de la Première Guerre mondiale. Les soubassements, les corniches et têtes de contreforts sont en béton armé.
Eglise de Vauquois de style néo-classique
Les Paysages
La Reconstruction c’est aussi la réhabilitation des terres, des forêts anéanties.
Il est nécessaire de les sécuriser, de les aplanir, de les replanter. Dès 1919, le ministère des régions libérées cartographie les zones sinistrées à 3 échelons, dont les « zones rouges » où toutes les activités sont impossibles dû à la multitude de munitions, aux produits chimiques, à la ferraille polluant les terres.
Le 24 avril 1923, l’Etat confie à l’administration forestière la gestion de la partie définitivement expropriée de la "zone rouge". 36 millions d’arbres sont plantés en huit ans. Les anciennes terres agricoles sont reboisées à 60% avec des résineux (pins noirs, épicéas, pins sylvestres) et à 40% par des feuillus (aulne blanc, bouleau, chêne, frêne, érable).
Les « Années Folles »
Les « Années Folles » commencent en 1920 et durent jusqu’en 1929.
Le Music-hall émerge avec Joséphine BAKER qui danse sur le rythme du Charleston. De grands noms comme Louis JOUVET, Sacha GUITRY deviennent connus par le théâtre, Chanel dans la mode, Picasso par ses peintures. Ce sera aussi des films, avec Nosferatu le vampire, Le Kid, Le Bossu de Notre-Dame, Ben-Hur, Métropolis, La Petite Marchande d’allumettes, etc.
C’est également le développement de l’automobile. En France, André Citroën construit les voitures de sa marque en série. Le Guide Michelin attribue ses étoiles. C'est aussi le développement de la TSF, l’amélioration de la lecture des disques 78 tours.
Les « Années Folles » se terminent avec le crash boursier de Wall Street en octobre 1929.
La Reconstruction en Argonne après la Première Guerre mondiale a été présenté lors d'une conférence le vendredi 4 novembre 2019 à Vienne-le-Château, ainsi qu'aux élèves de grande section de l'école de Vienne-le-Château.
Fonds documentaire:
La Reconstruction des années 20 en Meuse
Les maisons de la Reconstruction 1920/1930, CAUE80,
Reims à l’époque de l’Art Déco, une ville reconstruite après la première guerre mondiale, Olivier Rigaud, éd. Patrimoine ressources, 2006
Charlotte DENOËL, « La crise de 1929 en France », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 02 août 2019. URL : http://www.histoire-image.org/fr/etudes/crise-1929-france
Films des Années 20, Jürgen MULLER, éd. Taschen
Le Petit Journal de Sainte-Ménehould et ses voisins d’Argonne n°49 et n°68
Première Guerre mondiale : http://regards.grandeguerre.free.fr/pages/chronologie/chronologie_1914.html
Eglise d’Apremont-sur-Aire : http://inventaire-patrimoine.cr-champagne-ardenne.fr/dossier/eglise-paroissiale-saint-martin/b24fdd56-331b-4662-af28-fcd941cb47b7
Les ossuaires : https://verdun-meuse.fr/index.php?qs=fr/lieux-et-visites/monument-du-mois---mars-2011---ossuaire-de-la
Monuments aux morts :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Monument_aux_morts#cite_note-20
http://patrimoinedargoat.free.fr/paysguingampais/html/monum.html
https://www.tombes-sepultures.com/crbst_2146.html
Art Déco :
https://barnies.fr/definition-art-deco/
http://www.architecture-art-deco.fr/caracteristiques-art-deco.html
La Reconstruction :
http://www.fncaue.com/activites-pedagogiques/architecture-et-reconstruction/
Villes, villages et architecture à l’Est de la Somme :
Saint-Thomas-en-Argonne
https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Thomas-en-Argonne
Date de dernière mise à jour : 10/11/2019
Commentaires
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- 1. Masnada Gérald Le 02/08/2023
Bonjour, mon père est né à Varennes en Argonne en 1924.
Masnada Jean né le 13/08/1924.
J'ai une photo de la famille que la tradition familiale situe à Varennes en Argonne.
Une personne de Varennes M. Godard que j'avais rencontré m"a gentiment dit qu'il s'agissait probablement des baraques de la cité Bergère construite pour ces ouvriers.
Si cela vous intéresse je peux vous envoyer la photo et peut-être allez vous confirmer le lieu.
Pour ceci j'ai besoin de votre mail pour vous envoyer le pièce jointe.
Cordialement-
- jlargonnaisLe 05/08/2023
Bonjour, merci pour votre proposition de partager votre photo. L'adresse mail est la suivante : jlargonnais@orange.fr
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